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L’industrie de la viande serait-elle responsable du réchauffement climatique ? A en croire le dernier livre de Fabrice Nicolino, , Bidoche, l’industrie de la viande menace le monde, on n’en est pas loin. Et ce d’autant plus que son enquête est relayée par un collectif de personnes appelant à la grève de la viande présenté dans un article de Rue89.
La vache responsable de tous les meuh les maux de la planète ?
L’auteur accuse l’industrie de la viande d’être coupable pour bien des maux de notre planète : soja OGM, émission de gaz à effet de serre, gaspillage de l’eau, corruption à grande échelle dans certains pays, déforestation massive des forêts tropicales… Fabrice Nicolino accuse l’industrie de la viande d’être l’équivalent de l’industrie de l’amiante dans les années70 ou du tabac dans les années 50. Diantre. Le propos est assassin, ou seraient-ce les pratiques ?, en tout cas salutaire puisqu’il introduit dans le débat public la question de la place de la viande dans nos sociétés.
Voici le documentaire sur l’industrie alimentaire qui a secoué les Etats-unis. Food, Inc. décortique les rouages d’une industrie qui altère chaque jour notre environnement et notre santé. Des immenses champs de maïs aux rayons colorés des supermarchés, en passant par des abattoirs insalubres, un journaliste mène l’enquête pour savoir comment est fabriqué ce que nous mettons dans nos assiettes. Derrière les étiquettes pastorales de " produits fermiers ", il découvre avec beaucoup de difficulté le tableau bien peu bucolique que les lobbys agro-alimentaires tentent de cacher : conditions d’élevage et d’abattage du bétail désastreuses, collusion entre les industriels et les institutions de régulation, absence de scrupules environnementaux, scandales sanitaires... Éleveurs désespérés, experts indépendants, entrepreneurs intègres et défenseurs du droit des consommateurs esquissent, chacun à leur manière, le portrait d’une industrie qui sacrifie la qualité des produits et la santé de ses clients sur l’autel du rendement.
Après ce film vous ne regarderez plus votre assiette de la même manière
Colette Roos, journaliste à Rue89 et France Inter, a écrit au sujet du film : "Un monde où élever des vaches au pré serait un acte de résistance. Où l’on tuerait, dans un abattoir gargantuesque, 30.000 porcs par jour. Où il serait plus difficile d’obtenir le droit de visiter une usine de steaks qu’une centrale atomique. Où se faire servir un hamburger coûterait moins cher qu’acheter une pomme. Où les poulets, élevés dans le noir et engraissés trop vite, ne pourraient plus tenir sur leurs pattes.
Un monde où la nourriture rendrait malade et où il serait impossible de savoir de quoi elle est faite. Ce monde, c’est celui que les chaînes de fast-food et, derrière elles, les industriels de l’agroalimentaire ont façonné. C’est celui que le documentariste Robert Kenner a choisi de montrer dans son film à charge, Food, inc. Les acteurs principaux ? Mc Donald’s ou Monsanto, mais aussi Tyson, IBP ou Smithfield, transformateurs de viande qui contrôlent des millions de bêtes et décident du sort de fermiers désespérés et surendettés. Face à ces entreprises qui ruinent l’environnement autant que la santé de leurs clients, nul salut à attendre des instances de régulation américaines, infiltrées par d’ex-cadres de l’agroalimentaire. Le seul mode d’action possible ? S’informer pour comprendre pourquoi les calories les moins chères à l’achat sont aussi les plus coûteuses pour la planète, les humains et les animaux qu’ils exploitent. Un avertissement adressé à ses compatriotes, mais aussi valable ici, où des lobbies travaillent à affaiblir la règlementation européenne et des entreprises, à s’approprier le vivant. Consommateurs, vous êtes ce que vous mangez. Et vous forgez le monde de demain par ce que vous achetez".
Ce que vous allez apprendre avec Food, Inc.
Dans les années 70, le top 5 des emballeurs de viande bovine contrôlait environ 25% du marché. Aujourd’hui, les 4 plus grosses entreprises détiennent plus de 80% du dit marché. A la même époque, les Etats- Unis comptaient des milliers d’abattoirs produisant la majorité du boeuf vendu. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 13. Un supermarché moderne a, en moyenne, 47 000 produits ; la majorité de ceux-ci a été produit par seulement une poignée d’entreprises de l’agroalimentaire. En 1998, le Département de l’Agriculture des USA (USDA) a décidé de faire des tests bactériologiques contre la salmonelle et certains E. coli (bactérie intestinale). Ainsi, si une usine échouait plusieurs fois à ces tests, l’USDA pouvait la faire fermer. Après avoir été traîné au tribunal par les associations de producteurs de viandes et de volailles, le Département de l’Agriculture n’a désormais plus ce pouvoir. En 2007, 73 000 personnes ont été atteintes du virus E. coli. En 1972, l’Administration de l’Alimentation et des Drogues (FDA) a conduit 50 000 inspections sanitaires. En 2006, ce nombre est tombé à 9164 contrôles. Sous l’administration Bush, la FDA avait à sa tête l’ancien vice-président de l’Association Nationale des Robots de Cuisine. Toujours, sous Bush, le chef d’équipe de l’UDSA était un ancien chef du lobby de l’industrie bovine à Washington. Avant de se reconvertir dans l’agro-business, Monsanto était une industrie chimique qui a produit, entre autres choses, des pesticides (DDT) et l’Agent Orange (un défoliant utilisé pendant la guerre du Vietnam). Le juge de la Cour Suprême, Clarence Thomas était un avocat de Monsanto à la fin des années 70. Alors qu’il était en poste à la Cour Suprême, Mr Thomas a écrit, dans une affaire, une opinion majoritaire qui a aidé Monsanto à faire respecter ses brevets de semences. Avec 32 000 cochons tués par jour, l’entreprise Smithfield de Tar Heel en Caroline du Nord est le plus gros abattoir du monde. En moyenne, un américain mange plus de 90 kg de viandes pas an. 30% des terres américaines servent aux plantations de maïs. 1 américains sur 3, né après 2000 va contracter un diabète précoce.¨Pour les minorités, ce ratio peut monter à 1 sur 2.
« All you need is meat »
Fabrice Nicolino rejoint là Sir Paul McCartney. L’ex-Beatles est on le sait un végétarien devant l’éternel. Il appelle ainsi régulièrement ses concitoyens à cesser de manger de la viande. Un appel relayé par des associations prônant le végétatisme. Face à ces attaques qui menacent les intérêts des éleveurs, et seraient susceptibles, même si cela reste voir, de changer l’opinion des français face à un élément clé de leur alimentation, la réplique n’a pas tardé. A la manœuvre Interbev, l’interprofession bovine. Dans son argumentaire, Interbev répond à la fois sur la question de la consommation de viande par semaine, deux steacks en moyenne par semaine, en montrant qu’une grande part de l’élevage est dédié au lait et que d’autres pays font pire (L’Inde), que d’autres secteurs économiques polluent plus : le transport (de viandes ?), enfin rappelle que pour produite de la viande il faut des prairies, essentielles pour nous préserver des ravages des GES, pour finir sur notre identité culturelle très corrélée à l’histoire de la viande. Sur le plan des actions parlementaires, le monde de la viande n’est pas en reste. Ainsi, la Fival (viande chevaline) inscrit dans son rapport moral (page 9) les actions de lobbying au niveau européen.
Pour convaincre les français de continuer à manger de la viande, le Centre d’Information de la Viande (CIV) s’est payé un numéro du journal l’Actu, un quotidien pour enfants édité par PlayBac, déjà célèbre pour avoir ouvert ses colonnes à Areva. Dans ce numéro, on peut lire que « 4 à 5% des gaz à effet de serre en France sont dus au méthane » rejeté par les bovins en éructant(1). Des études existent afin de diminuer ces rejets liés à la présence de bactéries dans les estomacs des bovins, en les nourrissant à l’ail et au lin. Plus une page (la XV) sur les raisons qui doivent pousser les enfants à manger de la viande (ou du poisson ou des oeufs) tous les jours.
Au total, ce serait entre 11% et 18% des émissions de gaz à effet de serre (GES : dioxyde de carbone, ozone, méthane, vapeur d’eau et les gaz industriels), selon que l’on considère les herbivores seulement ou l’élevage dans son entier.
Le lobby de la viande sait montrer aussi tout son poids économique. En Normandie, par exemple, il représente 658 millions d’euros de valeur. Au niveau international, il se réunit au sein de l’OIV, office international de la viande.
Au final, la question que pose Nicolino ne porte pas sur le même périmètre que celui d’Interbev. Dans son livre, Fabrice Nicolino pose la question de la viande d’élevage en général et dans le monde entier, quand Interbev répond viande bovine en France. Certes, les deux thématiques sont liées mais ne se recouvrent pas entièrement.
Bidoche, l’industrie de la viande menace le monde
Si vous souhaitez approfondir ce sujet, Fabrice Nicolino a publié en octobre 2009 un livre passionnant et préoccupant sur l’industrie de la viande. Jamais lu ? En tout cas, jamais écrit. Ce livre sur la viande est rempli de très nombreuses révélations sur un univers que personne ne souhaite voir de près. La France a connu après 1945 une révolution de son régime alimentaire qui n’a rien de naturel. Elle consommait peu de viande, elle en « bouffe » des millions de tonnes chaque année.
Qui a voulu ce complet bouleversement ? Les jeunes « technocrates » autour de De Gaulle, après 1958, mais aussi les pontes de l’Inra, un institut public au service direct des intérêts industriels. Ce livre raconte la genèse d’un changement radical, et met des noms sur des actes. Joseph Fontanet, François Missoffe, Edgard Pisani, Edgar Faure, du côté des politiques, suivis par Henri Nallet, Édith Cresson, Michel Rocard quand la gauche a pris le pouvoir en 1981. Raymond Février et Jacques Poly du côté des chercheurs et des techniciens. Tous ont été au service de la bidoche.
Ensemble, ils ont imposé que la France devienne un immense hachoir à viande qui abat chaque année plus d’un milliard d’animaux domestiques. Des animaux traités comme des bêtes, parqués dans le noir, entravés, farcis d’antibiotiques et .d’hormones qui mettent en péril la santé humaine.
Nul n’a jamais parlé ainsi des dangers gravissimes que représentent le MRSA, le MAP, et toutes ces maladies émergentes qui donnent des sueurs froides aux autorités sanitaires.
La situation est-elle hors de contrôle ? Oui. Ce livre révèle que la panique a gagné quantité de bureaux officiels. Et comment l’élevage industriel cherche à masquer des vérités affolantes. Qui sait en France que l’élevage mondial émet plus de gaz à effet de serre que la totalité des transports humains, automobiles, bateaux et avions compris ? Qui sait que notre bétail est nourri par du soja transgénique venu du Brésil, grand responsable de la déforestation en Amazonie ? Qui reconnaît que les demandes chinoise et indienne de viande seront impossibles à satisfaire dans quelques années, faute de sol et d’eau ? Qui ose écrire que la demande globale de viande industrielle conduit tout droit à de nouvelles et tragiques famines de masse ?
Si la France est à ce point sourde et aveugle, c’est que l’agriculture industrielle y fait la loi depuis 1945. Un lobby d’une puissance exceptionnelle s’est installé au cœur même de l’État et ne cesse d’empêcher toute évolution qui remettrait en cause les places et rentes acquises. Ce livre plonge au cœur des mystères et attaque sans hésitation le noyau dur de ce lobby. En donnant des noms : Serge Michels, Louis Orenga, Thierry Coste. Enivrés par un pouvoir sans frein, les défenseurs de la bidoche ont plongé la France dans une crise globale dont elle n’est pas près de sortir. Sauf si. Sauf si le mouvement des consommateurs décide de s’attaquer enfin aux immenses intérêts, visibles ou masqués, de la viande industrielle. Une viande qui est devenue l’ennemi de l’homme.
Faut-il manger moins de viande pour sauver la planète ?
LEMONDE.FR | 15.10.09 | 12h25 • Mis à jour le 16.10.09
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L'intégralité du débat avec Fabrice Nicolino est l'auteur de Bidoche (Editions LLL, 2009), vendredi 16 octobre 2009
Fabrice Nicolino, auteur de Bidoche, L'industrie de la viande menace le monde, aux éditions Les Liens qui libèrent, a répondu, vendredi 16 octobre, aux questions des lecteurs du Monde.fr sur les effets nocifs de l'augmentation massive de la consommation mondiale de viande pour l'environnement et la santé.
ours : En quoi la production de viande a-t-elle des conséquences sur le changement climatique ?
Fabrice Nicolino : C'est une question complexe, mais on dispose d'un document officiel, institutionnel, un gros rapport de la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) qui date de 2006. En fait, il s'agit d'une analyse globale de tout le cycle de production de l'élevage au niveau planétaire. Pas seulement les animaux, mais leur alimentation, les moyens de transport utilisés [pour les mener aux abattoirs]. Ce rapport estime que l'élevage planétaire émet 18 % des gaz à effet de serre d'origine humaine, et ce total est supérieur à celui concernant les transports utilisés par les êtres humains (voiture, bateau...).
Pharrell_Arot : Bonjour. Etant moi-même un amateur de viande, je m'interroge sur les conduites à adopter pour conjuguer plaisirs alimentaires et développement durable. Quelles sont, selon vous, les précautions qu'un consommateur lambda peut prendre immédiatement ?
Fabrice Nicolino : La première chose, c'est de rappeler que la consommation de viande en France a été multipliée par 4 environ depuis l'entre-deux-guerres. On mange beaucoup trop de viande, pour des raisons économiques et politiques.
Je n'ai pas vraiment de conseil à donner. Mon avis est qu'on peut manger beaucoup moins de viande, manger du coup une viande de meilleure qualité. Personnellement, je mange de la viande, de moins en moins, et c'est de la viande biologique, car dans cette façon de produire, on s'interdit quantité de produits médicamenteux et chimiques.
Pharrell_Arot : Y a-t-il des consommations d'espèces moins dangereuses que d'autres pour la planète ? Quid du porc par exemple ?
Fabrice Nicolino : Le plus mauvais transformateur d'énergie, ce serait le bovin. Moins un animal consomme de végétaux, moins sa consommation nuit aux équilibres de la planète. Et de ce point de vue, il y a une certaine hiérarchie qui va du poulet au bovin en passant par le porc. Le moins mauvais, c'est le poulet.
Herve_Naturopathe : Y a-t-il un lobby français des bouchers/éleveurs aussi important qu'aux Etats-Unis ?
Fabrice Nicolino : Je crois vraiment que non. Il existe un lobby de la viande industrielle en France, puissant, mais qui n'a rien à voir avec l'extraordinaire importance qu'a pu prendre la "bidoche" aux Etats-Unis. Dans ce pays, il y a une histoire passionnante derrière le lobby de la viande. Cela fait un siècle qu'on dénonce les méfaits de ce formidable lobby américain de la viande. Un livre remarquable, La Jungle, est paru en 1906, d'Upton Sinclair, qui décrit l'univers des abattoirs de Chicago. C'est une très belle œuvre.
Aux Etats-Unis, le lobby est vraiment surpuissant ; des secrétaires d'Etat à l'agriculture, notamment sous Reagan, étaient eux-mêmes d'anciens industriels de la viande. Sous les administrations républicaines, mais pas seulement, il y a une espèce de consanguinité entre politiciens et lobby de la viande.
Pour en revenir à la France, oui, il existe un lobby de la viande, qui est représenté par le Comité d'information des viandes, qui a des liens étroits avec l'industrie de la viande, bien sûr, mais aussi avec l'appareil d'Etat, le ministère de l'agriculture et le syndicat ultramajoritaire dans la paysannerie française, la FNSEA.
Romain : Quels substituts peut-on utiliser pour la viande rouge en matière d'apports nutritionnels et de saveurs ?
Fabrice Nicolino : Il n'y a pas de réponse à une telle question... La saveur de la viande rouge est la saveur de la viande rouge. Je ne vois pas quel substitut on pourrait imaginer sur le plan de la saveur. Sur le plan nutritionnel, aussi curieux que cela paraisse, un grand nombre d'études montrent que les régimes végétariens ou les régimes extrêmement peu carnés sont les meilleurs pour la santé humaine. Je cite rapidement un nom, très connu dans les milieux de la nutrition : c'est un Américain qui s'appelle Colin Campbell. Il a réussi à mener une étude comparée de l'alimentation dans des cantons chinois d'un côté, et d'autre part dans des comtés américains. Une étude énorme qui a duré vingt ans. Il note que le régime chinois, très largement basé sur les végétaux, est infiniment meilleur pour la santé.
cocoparis : Pensez-vous qu'il faille aussi réduire notre consommation de lait ?
Fabrice Nicolino : C'est un débat ouvert, y compris sur le plan scientifique. La chose certaine, c'est que l'hyperconsommation de lait, qui est parallèle à l'industrialisation de l'élevage, est très néfaste pour la santé des humains. Mais on est passé d'une vache en 1945-1946 bien nourrie qui devait fournir environ 2 000 litres de lait par an, à des vaches qui en donnent 8 000, 10 000, voire 12 000 litres par an. Il est clair que quand on produit de telles quantités de lait, il faut absolument que ce lait soit consommé ensuite. Il faut que les gens en boivent. Il y a là une logique d'airain, très contraignante. Si on produit, il faut un marché, il faut des débouchés. Dans le domaine de la santé, le lait n'est pas un si bon aliment qu'on l'a cru ou feint de le croire pendant longtemps.
Apis88 : A ce jour, il est clairement démontré que les pays qui s'enrichissent voient la consommation de viande augmenter par habitant. Ce constat peut-il s'inverser ?
Fabrice Nicolino : C'est une question décisive, une question-clé. Il existe un modèle de consommation de la viande, le modèle occidental, basé sur une consommation très forte de viande. Or produire de la viande nécessite des quantités industrielles de céréales. Et les surfaces agricoles dans le monde ne sont pas extensibles à l'infini. Beaucoup d'agronomes de premier plan se demandent comment on pourra, dans les années qui viennent, satisfaire cette étonnante augmentation de la demande de viande dans des pays dits émergents, au premier rang desquels l'Inde, mais surtout la Chine, où 200 à 300 millions de Chinois réclament de la viande, car ils ont pour la première fois de l'argent pour en consommer et veulent rejoindre le modèle occidental.
Le problème, c'est que les terres agricoles qui permettraient de nourrir ce bétail manquent actuellement, et il paraît extrêmement difficile d'en trouver de nouvelles sur la Terre telle qu'elle est. Ce que je veux dire, c'est qu'à mon sens, le modèle de consommation de la viande qu'on connaît chez nous n'est absolument pas généralisable à la planète. Autrement dit, il me paraît hautement probable qu'il va falloir rapidement se poser la question centrale, essentielle, de notre modèle alimentaire. Faute de quoi, on pourrait sans doute passer de 1 milliard d'affamés chroniques actuellement à peut-être 2 ou 3 milliards à l'horizon 2050.
br : Pensez-vous que les politiques, dans leur réponse à la crise agricole actuelle, vont prendre en considération ce phénomène ?
Fabrice Nicolino : Clairement, non, non, non et non. Je vais faire un parallèle avec la situation en France en 1965.
Le ministre de l'agriculture du général de Gaulle s'appelle Edgard Pisani. En 1965, celui-ci fait une tournée triomphale en Bretagne, et il déclare, sous les acclamations : la Bretagne doit devenir l'usine à lait et à viande de la France. C'est très important, parce qu'on voit bien là que les politiques suivent bien entendu des objectifs, mais que par définition, ce sont des objectifs politiques. Or nous sommes en train de parler de questions d'une autre nature, qui appellent des décisions beaucoup plus réfléchies, beaucoup plus pensées, sur un terme beaucoup plus long que le temps des politiques. J'ajouterai que l'écologie, la crise écologique et tout ce qui y est associé imposeraient des visions, des points de vue, des décisions dont la classe politique, toutes tendances confondues, de l'extrême droite à l'extrême gauche, est incapable.
GrandGousier : D'accord, il faut stopper cette orgie de viande, pour toutes les raisons recensées dans votre livre. Mais par quoi commence-t-on ? En France, quelles seraient les premières actions à mener, les premiers objectifs à se fixer ?
Fabrice Nicolino : Je ne suis pas là pour donner des leçons à qui que ce soit. Mais en tant que personne, je pense qu'il serait bon de s'atteler à la construction d'un mouvement de consommateurs tel qu'on n'en a encore jamais vu. Je pense, dans le droit fil de ce que je viens de dire sur la classe politique, que malgré leur intérêt et leur vaillance, les mouvements de consommateurs qui existent en France, par exemple l'UFC-Que choisir ou 60 millions de consommateurs, expriment en grande partie des préoccupations d'un autre temps. Je pense qu'il serait utile, nécessaire pour tous qu'un mouvement de consommateurs naisse, qui intègre les nouvelles données de base sur la crise écologique, qui est fondamentalement une crise des limites physiques. Et ce mouvement, s'il apparaissait, très certainement, lancerait des actions collectives contre la viande industrielle. Selon moi, un tel mouvement passerait nécessairement par des formes de boycott.
Herve_Naturopathe : Etre "consommacteur", n'est-ce pas la réponse ? Consommer avec réflexion et respect...
Fabrice Nicolino : Sûrement. Mais la question est quand et comment, car des mouvements, il y en a déjà eu. Je rappelle le boycott du veau aux hormones en 1980, mouvement lancé par UFC-Que choisir. La consommation de la viande de veau a été divisée par 6 ou 8, c'était très impressionnant. Et le système s'est adapté, puis s'est renforcé. Donc la question est vraiment de savoir comment trouver une efficacité en face d'une industrie qui est reliée par quantité de fils à tous les pouvoirs en place. Qu'ils soient administratif, politique, industriel, syndical. C'est une question que je m'adresse à moi-même : comment devenir "consommacteur" réellement, et plus seulement dans les propos.
hadadada : Devra-t-on dans le futur arrêter totalement de consommer de la viande ?
Fabrice Nicolino : Je ne vois pas ce point-là à l'horizon de ma vie. J'ai découvert en tout cas, en écrivant ce livre, qu'on pouvait se passer de viande. Je l'ignorais vraiment. Je crois qu'en fait, on a moqué trop longtemps les végétariens, on a prétendu parfois contre l'évidence que leur santé était très mauvaise. Certains lobbyistes dont je parle dans mon livre rappellent, pour disqualifier les végétariens, que tant Hitler que Jules Bonnot, l'anarchiste, étaient végétariens tous les deux. Ce que j'ai vu, c'est qu'on peut vivre sans manger du tout de viande. Pour les grands équilibres, pour affronter les grands problèmes qui sont devant nous, à commencer par la faim, il me paraît vital que nous changions à nouveau de régime alimentaire et que nous renoncions à une grosse partie de la viande que nous ingurgitons chaque année. Mais plus de viande du tout, je n'y crois pas trop, je pense que c'est une question anthropologique, qui en amène beaucoup d'autres. Je ne suis pas sûr que l'humanité soit vraiment destinée à ne plus manger de viande.
cocoparis : Et que dit-on aux éleveurs ? changez de métier ? devenez céréaliers ?
Fabrice Nicolino : C'est une question terrible. J'aime les paysans. C'est vrai que je préfère les paysans vivriers du Sud à ceux gorgés de subventions du Nord, mais le monde de l'élevage est un monde où j'ai rencontré des tas de belles personnes, même dans l'élevage intensif. Mais je vais essayer d'être direct : je pense que l'élevage industriel est condamné. Je pense que la France, la société française, a contracté une dette envers ses éleveurs, car on a tout organisé pour que l'élevage devienne industriel, et il serait insupportable de dire brusquement aux éleveurs de changer de métier. Je crois qu'on pourrait imaginer un plan de transition, un peu sur le modèle du plan de transition de sortie du nucléaire en Allemagne. On pourrait imaginer un plan de transition d'une quinzaine d'années pour permettre un atterrissage en douceur, pour permettre à un certain nombre d'éleveurs de prendre dignement leur retraite, et pour inciter les plus jeunes à se lancer dans un élevage plus respectueux des animaux, des équilibres naturels, et des humains qui sont en bout de chaîne.
Scheatt : Les transformations nécessaires vers un mode de vie plus sobre sont-elles compatibles avec l'organisation actuelle de la distribution et de l'élevage ?
Fabrice Nicolino : Non, car il faut comprendre qu'il s'agit d'un système extrêmement efficace dans son registre, très complexe, très rodé, qui exclut par exemple tout droit des animaux à exister. Moi, au risque d'en choquer certains, je suis très sensible au sort des humains, je suis un humaniste, mais j'estime que les animaux ont un droit à l'existence. J'ai dédié mon livre aux animaux morts sans avoir vécu. J'y tiens beaucoup, car dans un passé pas si lointain, pendant huit mille à neuf mille ans, les humains ont vécu un compagnonnage avec les animaux, qui n'était pas sans cruauté, violence, dureté. Les animaux donnaient leur chair, leur peau, leur force de travail, mais ils demeuraient des êtres vivants, sensibles.
Et l'industrie a totalement transformé les bêtes, à qui on doit tant. Je rappelle que sans l'existence des animaux d'élevage, il n'y aurait pas eu de civilisation humaine. On est donc passé à une situation d'industrialisation où l'animal est devenu une chose, une marchandise, un objet d'échange, du matériel. Je crains que cette rupture dans l'histoire de notre relation avec l'animal nous enlève une part considérable de notre humanité. Je crains que cette manière de traiter cet "autre" qu'est l'animal ouvre la voie à un gouffre moral.
Fabrice Nicolino est journaliste. Il est l’auteur notamment de Pesticides, révélations sur un scandale français (2007) vendu en grand format à 35 000 exemplaires. Consulter son blog.
Références : Bidoche de Fabrice Nicolino - Editeur : Editions LLL, les liens qui libèrent - Date de parution : 7 octobre 2009 - 385 pages - ISBN-13 : 978-2918597018 - Prix public : 21 €
Le lobby de la viande poursuit en justice les défenseurs des animaux
L’industrie de la viande, qui fait l’objet de critiques de plus en plus sévères dans le monde entier, tente par des actions en justice de faire taire ses opposants. Après que de multiples études aient mis en évidence le lien entre la consommation de viande et les maladies imputées à l’alimentation, l’industrie de la viande a décidé de confier à des avocats la tâche d’attaquer ses adversaires.
Aux Etats-Unis, le procès contre la célèbre et populaire vedette de télévision Oprah Winter touche à sa fin. Des éleveurs texans lui réclamaient 11 millions de dollars de dédommagement parce que, dans son talk show du 25 avril 1996, elle avait critiqué les conditions d’élevage des bovins. Elle avait en outre déclaré qu’elle ne mangerait plus de viande de bœuf à cause de la crainte de l’ESB, après avoir dialogué avec son invité Howard Lyman. Ce dernier est un ancien fermier qui a renoncé à ce métier pour des raisons éthiques et qui est devenu végétarien. Il est actuellement le Président de l’Union Internationale Végétarienne.
La cour d’assise a rendu son verdict après des semaines de débats: la préservation de la liberté d’expression doit primer sur la perte subie par les éleveurs. Ce cas reste malheureusement une exception. Dans le Vegi-Info 3/97, nous avions relaté comment le procès des deux chômeurs anglais qui, suite à une distribution de tracts contre Mc Donald’s, ont été poursuivis en justice. N’ayant pu s’offrir un avocat pour leur défense, ils ont été condamnés à payer de fortes amendes. En Angleterre, les militants pour le droit des animaux intensifient leurs actions, utilisant parfois des moyens illégaux, que ce soit le transport, les conditions de détention ou les méthodes d’abattage des animaux. La justice répond à ces protestations par des peines toujours plus lourdes, avec l’espoir que celles-ci auront un effet dissuasif. Actuellement une douzaine de militants pour le droit des animaux sont emprisonnés en Angleterre. Le dernier procès concerne Barry Horne. Il a été condamné à 18 ans (!) de prison pour des actes ayant entraîné des dégâts matériels. La grève de la faim qu’il a menée durant plusieurs semaines l’a fait connaître dans toute l’Angleterre. Il protestait alors contre les promesses électorales non tenues du gouvernement travailliste. Ce parti s’était engagé à prendre des mesures concernant l’expérimentation animale (notamment l’interdiction de tester les cosmétiques sur les animaux).
Aux Etats-Unis, il y a également des militants (actuellement 7 connus) emprisonnés pour des actions entreprises contre l’exploitation des animaux. L’action en justice contre Douglas Joshua Ellermann (19 ans) est en cours. Il risque une peine de prison entre 30 et 35 ans!
Même si toutes ces personnes actives pour le droit des animaux n’ont provoqué que des dégâts matériels, la question de savoir si l’utilisation de moyens illégaux a un impact positif et acceptable est posée. Mais lorsqu’on voit comment les animaux, sont traités aujourd’hui et combien impuissants sont ceux qui témoignent de la compassion pour ces êtres vivants torturés, il n’est pas étonnant que de plus en plus de personnes ne se contentent plus de rester spectateurs.
La violence à l’encontre des animaux suscite la violence en retour. Seulement il y a une violence légale et une autre illégale, ceci selon la loi créée par l’être humain dans le but de protéger «son droit» à la violence à l’encontre des autres espèces. Malheureusement, la violence en retour ne fait souvent qu’engendrer une nouvelle violence; c’est pourquoi l’ASV ne soutient que des méthodes pacifiques dans ses actions en faveur du droit des animaux.
jeudi 16 décembre 2010
La Fondation Brigitte Bardot dénonce les mensonges du lobby viandard
LA FONDATION BRIGITTE BARDOT PORTE PLAINTE AUPRES DU JURY DE DEONTOLOGIE PUBLICITAIRE CONTRE LA CAMPAGNE RADIOPHONIQUE DU CENTRE D’INFORMATION DES VIANDES
Sous le titre « soyons Fermes »¹, le CIV tente actuellement de présenter la production française comme étant issue d’une agriculture « familiale », respectueuse des animaux et de l’environnement.
Des spots radiophoniques jugés mensongers et malhonnêtes par la FBB.
Elevage de porcs Dans le spot « Pourquoi l’élevage des porcs est familial en France ? », il est dit que l’élevage des porcs en France n’est pas industriel mais familial… Or, plus de 90 % des élevages porcins en France² se pratiquent en bâtiment, sur caillebotis. Ces animaux, qui ont subi une caudectomie et une castration à vif, ne sortiront de leur hangar qu’au moment de partir vers l’abattoir. Il est donc malhonnête de présenter de manière bucolique un élevage intensif, totalement déshumanisé.
Impact de la viande sur les humains, les animaux et l’environnement,
Elevage de Veaux Dans le spot « Aujourd’hui comment les veaux sont-ils élevés ? », il est dit que la couleur blanche de la viande (production française) est obtenue par une alimentation à base de produits laitiers parfaitement adaptée aux besoins des veaux… Ceci est totalement faux car après avoir été retiré à sa mère, le veau est nourri avec un mélange liquide pauvre en fer qui permet d’obtenir cette couleur anormalement claire de la viande. Le jeune animal anémié est aussi privé de l’alimentation solide dont il a besoin dès sa deuxième semaine et pour éviter que sa viande devienne rouge, ce ruminant élevé sur caillebotis n’a pas droit à l’herbe (trop riche en fer).
Là encore, les propos du spot sont mensongers car, ne pouvant s’alimenter avec une nourriture adaptée à ses besoins, le veau est victime d’un développement anormal du rumen qui constitue une grave entrave à son bien-être.
Elevage de Bovins Tout aussi scandaleux, le spot « Quel est l’impact de l’élevage bovin sur l’environnement » où il est dit qu’en broutant de l’herbe « nos vaches maintiennent les prairies, ce qui permet le stockage de carbone dans le sol… comme les forêts ! ».
Bon pour l’environnement l’élevage ? Dans son rapport « l’élevage aussi est une menace pour l’environnement », l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) indique que le secteur de l’élevage émet des gaz à effet de serre qui sont plus élevés que ceux produits par les transports (toutes catégories confondues). Le secteur représente, en outre, respectivement 37 % de tout le méthane dû aux activités humaines (agissant sur le réchauffement 23 fois plus que le CO2), en grande partie produit par le système digestif des ruminants, et 64 % de l’ammoniac qui contribue aux pluies acides. L’élevage est aussi responsable de l’appauvrissement des sols et de la mise en péril des réserves naturelles d’eau puisque la production d’un seul kilo de bœuf nécessite 323 m² de pâturages, 7 à 16 kilos de grains ou fèves de soja et jusqu’à 15 500 litres d’eau !
Le secteur de l’élevage a donc une incidence directe sur le réchauffement climatique, la pollution des sols, des nappes phréatiques, et représente un terrible gaspillage puisque près d’un tiers des céréales produites mondialement est destiné à nourrir les animaux pour la production de viande.
POUR CHRISTOPHE MARIE, PORTE-PAROLE DE LA FONDATION BRIGITTE BARDOT : « Nous dénoncions déjà la propagande du CIV dans les écoles mais aujourd’hui nous ne pouvons plus tolérer de subir cette campagne de désinformation, en partie orchestrée par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Ces publicités mensongères présentent la production française de viandes comme issue d’élevages « familiaux » ou « traditionnels » alors qu’elle provient, presque exclusivement, d’élevages intensifs. Plus de 80 % des poules pondeuses et poulets de chair sont élevés dans des hangars sans accès à l’extérieur, 90 % des cochons sont élevés sur caillebotis en bâtiments et 99 % des lapins sont élevés en batterie de cages. Voilà ce qu’est l’élevage en France aujourd’hui et cela ne correspond nullement au discours bêtifiant et malhonnête du CIV. »
Le Centre d'information des viandes nous prend pour des enfants
Par Sébastien Arsac | L214 | 04/03/2010 |
Le Centre d'information des viandes (CIV), association loi 1901 se présente comme une « plate-forme d'échanges et d'information », dont la vocation est de « vulgariser des données scientifiques et techniques », et de « rétablir une information objectivée grâce à des études scientifiques et de consommation ».
A ce titre, l'association intervient dans les écoles, collèges et lycées pour « contribuer à une meilleure connaissance des élèves des viandes… ». C'est là que le bât blesse.
Le grand public, heureusement, commence à savoir que la surconsommation de viande a une lourde responsabilité dans le réchauffement climatique, la faim dans le monde, la souffrance animale, la pollution des eaux, la déforestation, les menaces sanitaires… et autres problèmes majeurs.
Mais ce n'est pas grâce à « l'information objectivée » du CIV que ces données parviennent aux gens bien informés.
Et 10% de fonds publics
Le père du Centre d'informations des viandes, Marcel Bruel, est une figure emblématique de l'agriculture française du XXe siècle. Il a notamment participé à la naissance de la Socopa, aujourd'hui aux mains du groupe Bigard, premier transformateur de viande en France.
Dès 1979 il crée l'Interbev, organisation interprofessionnelle pour le secteur du bétail et des viandes dont émane en 1986 le Centre d'information des viandes. Les statuts de l'époque indiquaient clairement que l'objectif était de :
« conduire des actions de relation publique afin d'améliorer l'image et la consommation des produits carnés. »
Mais ils ont ensuite été toilettés pour indiquer en objet :
« conduire une mission d'information sur les produits et les filières. »
Au conseil d'administration, en revanche, rien n'a changé. On trouve tous les présidents des différentes organisations professionnelles des filières viandes (hors volaille). Le financement, à hauteur de cinq millions d'euros annuels, est assuré par les organisations interprofessionnelles (Interbev et Inaporc). Il est complété par 10% de fonds publics.
A l'école une brochure pour les filles, une pour les garçons
Comment « générer un capital sympathie de la part des jeunes vis-à-vis de la viande » ? C'est très simple : pour les primaires, inventez un jeu-concours, pour les ados, créez un site web « djeun's », Planet'Viandz, et prêchez dans les écoles, collèges et lycées.
C'est ce qui se passe actuellement, avec la complicité de l'Education nationale qui autorise la diffusion de brochures (une pour les filles, une pour les garçons) ou de jeux-concours avec une console Wii à la clé pour le gagnant.
Les adultes ne sont pas oubliés. Site Internet, plaquettes, dossiers à destination des parents d'élèves, des infirmières scolaires et des responsables de la restauration. Le tout conçu par des professionnels de la communication.
Autre action du lobby de la viande : mener une veille pour être prêt à jouer les pompiers dès lors que la consommation de viande est menacée. Exemples :
En 2009, lorsque le Programme national nutrition santé (PNNS), qui délivre des recommandations officielles en matière de nutrition publie une brochure pointant les risques de cancers lié à la consommation de viande, le CIV s'empresse de dégainer des brochures gratuites à la disposition des professionnels de santé.
Lorsqu'en décembre 2009, Paul Mac Cartney et Rajendra Pachauri viennent plaider pour une réduction de la consommation de viande au Parlement européen, ce sont 57 pages de publicité qui sont achetées dans les quotidiens, pour une facture de 400 000 euros.
Si vous n'êtes pas totalement convaincu par l'objectivité du Centre d'information de la viande, vous pouvez toujours dire non à sa propagande dans les établissements scolaires…
L214, l'association à l'origine de cette tribune, tire son nom de l'article du code rural consacré à la protection des animaux. Fondée par des militants végétariens qui bataillent pour l'abolition du foie gras, elle a développé des méthodes particulières en s'infiltrant dans des élevages et abattoirs d'où elle extrait des images qui démontrent la souffrance des animaux. Comme par exemple les vidéos filmées dans des élevages de poules ou dans des abattoirs Charal.
Photo : de la viande (Fotoosvanrobin/Flickr) et une capture d'écran du site Planetviandz
Comment le lobby de la viande est entré à l’école
Enquête - Depuis une semaine, le Centre d'information des viandes a lancé une opération séduction à l'attention des collégiens et lycéens, sous couvert de mission pédagogique.
“Prendre du plaisir à manger, c’est d’abord écouter ses sens, se mettre en éveil ! Et la viande pour découvrir c’est très sympa !”. C’est ainsi que le Centre d’information des Viandes – CIV en plus court – entend redorer l’image de la viande dans les écoles. Depuis le 22 février et jusqu’au 16 avril, cette association créée en 1987 à l’initiative des professionnels du bétail, des viandes et de l’élevage a lancé l’assaut sur les collèges et lycées de l’Hexagone. A ceux-là, des affiches façon tags, des brochures ou encore des jeux pour gagner appareils photos ou enceintes ipod sont proposés. Pour les cantines, l’association propose des recettes à base de viande. Objectif ? “Réapprendre aux jeunes les produits et le goût des viandes brutes”, détaille Louis Orenga, directeur du CIV. En clair, qu’il y a une vie au delà du steak haché enserré dans un burger.
Les associations végétariennes crient au scandale. “Aujourd’hui, il y a un problème de surconsommation de viande, souligne Brigitte Gothière, de L214, une association de protection animale. Alors que le CIV puisse aller dans les écoles pour inciter les enfants à manger de la viande !”“Ils parlent du plaisir gustatif de la viande mais oublient de mentionner le revers de la médaille. Les problèmes de pollution des eaux, de déforestation, d’effet de serre lié à l’élevage, à l’abattage et au transport des animaux mais aussi les problèmes de santé publique liés à la consommation de viande.” L’association a donc lancé une pétition contre l’intervention du CIV dans les écoles.
Pub ou pas pub ?
Car au delà du débat autour de la consommation carnée, c’est le principe même de la promotion dans le milieu scolaire qui fait grincer des dents. Là, les esprits en friche et les cœurs encore tendres offrent des cibles très alléchantes pour les marchands en tout genre. “Il est consternant que les portes des collèges et des lycées soient ouverts à de purs opérations mercantiles et publicitaires aux antipodes des réelles préoccupations de santé”, dénonce ainsi l’association végétarienne de France dans un communiqué.
Le CIV lui se défend bec et ongles. “Il ne s’agit absolument pas d’une campagne de publicité, souligne Louis Orenga. Sa vocation n’est pas d’inciter les jeunes à manger plus de viande mais à les sensibiliser à la qualité. La quantité consommée dans les cantines est fixée par la diététiciennes de l’école. ” Et, souligne encore M. Orenga, “le CIV est une association à fonds publics soumis sur le plan nutritionnel au Programme National Nutrition Santé [1] et dans les écoles aux recommandations du Groupe d’Etude des Marchés Restauration Collective et Nutrition [2]”. Reste que pour l’association L214, le CIV n’en est pas moins “une association de producteurs destinée à améliorer l’image de la viande et des productions bovines.”
L’exception des partenariats
Mais à quel titre le CIV a-t-il le droit de faire passer ses messages dans les écoles ? “En principe l’école est sanctuarisée, explique Monique Dagnaud sociologue à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et auteure de “Enfants, Consommation et Publicité télévisée”. Mais les producteurs ont trouvé le moyen de pénétrer dans les écoles en jouant la carte des bonnes pratiques.”En fait si le démarchage publicitaire ou les encarts sur les plaquettes scolaires est banni, les entreprises peuvent librement tisser des partenariats avec les établissements.
A condition que leurs kits ou outils aient “un réel intérêt pédagogique” et “s’inscrivent dans le cadre des programmes scolaires”, précise une circulaire parue en 2001 au Bulletin Officiel. Dans ce cas, l’entreprise gagne le droit de “faire apparaître discrètement sa marque sur les documents”. Au service de presse du ministère de l’Éducation on justifie clairement cette logique : “Pour les professeurs, c’est une manière d’appuyer leur cours, de travailler sur le côté pratique. Du côté des entreprises, ça permet de faire connaître les produits. Chez les enfants le bouche à oreille ça marche”. Une chose est sûre, au pays des publicitaires, l’école ne fait plus figure de sanctuaire.
Via terraeco.net
[1] Le PNNS est un plan qui vise à améliorer l’état de santé des Français via des recommandations nutritionnelles
[2] Le GER-MCN fixe notamment les règles dans les cantines
De l’argent et de très bonnes relations avec l’Etat, voici les deux mamelles de la filière viande pour promouvoir ses produits. Et fermer le clapet à ses détracteurs.
Les éleveurs français sont sur la défensive. Il y a d’abord eu Bidoche, un brûlot contre « l’industrie de la viande », publié en septembre 2009 par le journaliste Fabrice Nicolino. Puis, durant la conférence de Copenhague sur le climat, il y a eu la grève de la viande suivie par plusieurs figures de (...)
Changer son alimentation est un choix individuel efficace pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Voici le refrain qu’entonne depuis quelques mois le duo Rajendra Pachauri, président du Groupe d’experts sur l’évolution du climat, et Paul McCartney, l’ex-Beatles. Le Prix Nobel de la Paix et la rock star appellent à s’abstenir de manger de la viande une fois par semaine. Fourchette à la main, Terra Eco a enquêté dans votre assiette, dans les élevages, dans les supermarchés. En France, en Argentine et aux Etats-Unis. Le magazine Néoplanète propose également un sujet similaire avec les chefs étoilés Alain Ducasse, Olivier Roellinger et Alain Passard qui se livrent sur le sujet, tout en évoquant l’évolution de notre cuisine.
Du champ au rayon du boucher, votre bifteck parcourt des milliers de kilomètres. Enquête sur un gouffre environnemental à la sauce au poivre à découvrir dans le nouveau numéro de Terra Eco (n°11 - février 2010).
Au sommaire de ce dossier :
ETAT DES LIEUX : 65 millions de carnivores. De l’éleveur au supermarché, notre bout de gras adoré carbure aux hectares de terres, aux tonnes de céréales, aux kilos d’engrais, aux litres de pesticides et d’eau. Or, chaque Français mange, en moyenne, 100 kg de viande par an. FOCUS : Nos bêtes sont nourries aux OGM. Vous pensiez qu’elles mangeaient de la bonne herbe et de la paille ? C’est raté ! INTERVIEW : « Manger de la viande, une revanche sociale ». D’où vient notre relation passionnelle avec le steak ? Réponses de Jean-Pierre Corbeau, professeur de sociologie de la consommation et de l’alimentation à l’université de Tours. PRATIQUE : Une désintoxication en 3 étapes. Si on considère que la viande est une drogue, pourquoi ne pas décrocher ? Conseils pour une « rehab » réussie. FACE A FACE : Eleveur contre végétarien. Terra Eco joue les arbitres dans un combat très musclé. Les mots « fausses évidences », « hara-kiri », « roter » et « péter » fusent. Comme les uppercuts et les directs du droit. Ouch ! ENQUETE France : qui tire les ficelles du bifteck ? De l’argent et de très bonnes relations avec l’Etat, voici les deux mamelles de la filière viande pour promouvoir ses produits. Et fermer le clapet à ses détracteurs… REPORTAGE Argentine : le pays où les vaches ont déserté les champs. Au pays du bifteck roi, les plaines se remplissent… de soja. Et les Européens n’y sont pas pour rien. PEOPLE : Végétariens et célèbres (et inversement). Terra Eco est parti à la recherche des stars anti-viande. Et il n’y a pas que Paul McCartney ! PORTRAIT : SOS carnivores en détresse. Patty Knutson est végétalienne et c’est son métier. Plus exactement, elle aide des Américains à chasser le steak de leur assiette. Coach végétarien, une profession d’avenir ?
A la une du nouveau numéro de Néoplanète (N°12 – Février/Mars 2010) : la polémique sur la viande. En mangeons-nous trop ? Faut-il devenir végétarien ?
Au sommaire de ce dossier : Y’a pas que le steack dans l’assiette ! Par Fabrice Nicolino. Depuis quelques décennies, notre consommation de viande a triplé et notre rapport aux animaux a changé. Ce n’est pas sans incidence sur notre santé. Le bonheur n’est plus dans le pré. Loin des élevages traditionnels, l’animal est devenu une industrie source de mal-être et de pollution. Néoplanète a rencontré deux des meilleurs spécialistes de cette question, devenue fondamentale pour notre quotidien. Et notre avenir. Les chefs se mettent à table. C’est le débat du moment ! Après le livre de Fabrice Nicolino Bidoche ; la « grève de la viande » de certains participants à Copenhague ; la Une du Monde sur les nuisances de l’élevage, Néoplanète a souhaité donner la parole à ceux qui enchantent nos assiettes. Alain Ducasse, Alain Passard et Olivier Roellinger, trois de nos plus grands chefs se livrent sur le sujet tout en évoquant, chacun à sa manière, l’évolution de notre cuisine.
Et aussi : la beauté au miel, 10 gestes pour préserver notre intérieur, l’interview de Pascal Légitimus, ambassadeur de « Play to stop : Europe for climate », les meilleures stations de sports d’hiver écolos…
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