cultiver son toit : jardins sur les toits à Montréal...
Hong-Kong, Tokyo, Detroit, Montréal… Depuis quelques années, on assiste dans ces villes et dans bien d’autres encore à une redéfinition du concept et de la pratique de l’agriculture urbaine. Face aux problèmes posés par la surpopulation et par la dégradation de l’environnement, y compris urbain, de nombreuses initiatives ont vu le jour dans le but de développer l’agriculture au sein même des grands centres-villes. L’agriculture sur les toits est l’une d’entre elles, et son potentiel est énorme.
Jardins sur les toits de Montréal from Jean-Marc Abela
Entre les bâtiments au style anglais du très réputé Mc Gill Collège dans le centre-ville de Montréal, Tim veille à la bonne croissance des fruits, légumes ou autres aromates du jardin implanté là, au milieu des grattes-ciels. Trois fois par semaine entre mars et octobre, il répond présent. Ce jardin au cœur de la ville, installé en partie sur les toits des édifices de l’université, c’est un peu le sien et celui des volontaires de l’association pour laquelle il travail, le Santropol Roulant. Il s’agit d’une association Montréalaise œuvrant auprès de populations à mobilité réduite à qui elle sert des repas gratuitement plusieurs fois par semaines.
Ce projet novateur d’agriculture urbaine est le fruit d’un partenariat original entre l’Université Mc Gill et le projet des Jardins sur les toits de l’ONG Alternative et du Santropol Roulant. Le concept sur lequel ces jardins ont été créés est simple et original : occuper l’immense espace non-utilisé des multiples toits d’immeubles dans une grande ville comme Montréal pour y faire pousser plantes, fruits et légumes.
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Un concept réinventé
Le concept de l’agriculture urbaine n’est pas nouveau. «Nous n’avons rien inventé, nous confie Tim. Ailleurs dans le monde, sur d’autres continents, cultiver dans la ville pour se nourrir est une nécessité, une activité génératrice de revenus». Les jardins dans les villes ou en périphérie proche ne sont eux non plus pas vraiment nouveaux. Que l’on soit en Europe ou en Amérique du Nord, il existe depuis longtemps des jardins communautaires ou jardins collectifs, ou même des petits potagers installés dans les cours arrière de certaines maisons de villes ou appartements de rez-de-chaussée. Malgré tout, ce qui est plus nouveau c’est le fait que « depuis 10 ans avec le retour de l’idéologie du bien manger, les habitants dans les grandes villes s’intéressent à l’alimentation produite localement, une alimentation de bonne qualité. Donc si tu t’intéresse à l’approvisionnement local, tu es amené à t’intéresser à l’agriculture urbaine», nous confie Tim. C’est dans ce contexte que des idées nouvelles comme celle des jardins sur les toits ont émergés.
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« Quelque chose de simple »
Pour cultiver sur son toit ou sa terrasse, plusieurs systèmes existent. Le plus simple et le moins onéreux est celui de la «culture hors sol». C’est celui que Tim et ses acolytes utilisent et qu’ils entendent promouvoir. « Au départ, nous précise-t-il, nous voulions quelque chose de clair et simple. Il faut que les gens puissent s’absenter trois jours de chez eux et que la plante ne soit pas morte car cela les découragerait trop, surtout la première année ». La solution consiste donc à installer des bacs en plastique (photo) remplis de terreau et dotés d’un double fond avec une réserve d’eau. Sur ses 274 bacs, Tim estime qu’ils va récolter cette année près d’une tonne de fruits et de légumes sur l’ensemble de la saison.
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Une solution durable aux problèmes actuels des villes
Depuis environ 10 ans, dans une ville comme Montréal, divers projets similaires à celui sur lequel travail Tim ont vu le jour. Ils ont été initiés par des associations à but non lucratif comme le Santropol Roulant, Alternatives mais aussi le Crapeau ou encore Jardins sur les toits. Ces associations œuvrent pour la plupart en sécurité alimentaire auprès de populations défavorisées ou en promotion de solutions environnementales et durable pour la ville. Même la mairie entend aujourd’hui promouvoir ce type d’initiative.
L’exemple n’est pas isolé. On le voit se développer dans de nombreuses villes du monde. L’initiative permet en effet de faire émerger des perspectives très intéressantes pour les grandes métropoles face aux problèmes actuels ou futurs de pollution, d’augmentation des températures, d’inondations et de sécurité alimentaire.
Ainsi les résultats, qu’ils soient sociaux, économiques ou environnementaux, vont au delà des espérances. Comme le confirme Tim, « la verdure sur un toit crée une couche d’isolation et permet de filtrer l’eau de pluie ». Par ailleurs, dans un contexte de réchauffement climatique global de plus en plus ressenti dans les grandes agglomérations, ce type d’expérience « permet de réduire les îlots de chaleur urbains » et la température de manière plus générale. Économiquement parlant, généraliser de tels projets permettrait également la production moins coûteuse d’aliments plus frais. C’est aussi la réduction des émissions de polluants dues à la « réduction des distances de transport des produits consommables » qui est en jeu. Enfin, d’un point de vue social, ce type de projet urbain « contribuerait au développement de l’entraide communautaire en favorisant l’échange des produits et des connaissances », comme l’affirme la municipalité de Montréal.
En France, à l’exception de quelques projets mis en place individuellement et marginalement, il existe assez peu d’initiatives d’agriculture sur les toits. On ne connait pas vraiment les raisons de ce retard, qui se retrouve plus généralement au niveau des actions et initiatives communautaires innovantes. En mai 68, dans les rues de Paris on pouvait lire ou entendre : «sous les pavés, la plage». Et si en 2010, le slogan devenait : «sur nos toits, des champs» ? Demandez à Tim !
T.C.
Photo : Thibault Chevalier
source : http://www.lecourant.info/2010/10/07/cultive-mon-toit/
Pour aller plus loin :
Santropol Roulant est un organisme communautaire montréalais récipiendaire de plusieurs prix qui a été fondé et est géré par des jeunes. Il réunit des gens de toutes cultures et générations grâce à une approche novatrice en matière de popote roulante. Il encourage également les jeunes à jouer un rôle actif au sein de leur communauté. Santropol Roulant utilise la nourriture comme véhicule pour créer de la confiance et bâtir des ponts entre les générations dans une ville qui compte le taux d’isolation le plus élevé au pays parmi les personnes âgées.
Depuis 1995, l’organisme a livré plus de 350 000 repas à des personnes âgées et à des gens en perte d’autonomie, et a offert plus de 275 stages et emplois à des jeunes de la communauté. Il s’est bâti une réputation partout au Canada en tant qu’organisme communautaire avec une vision de changement social en adoptant des points de vue novateurs dans le domaine de l’engagement des jeunes, des systèmes alimentaires urbains et des soins à la communauté.
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