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VIVRE AUTREMENT...

Gwenola Doaré a quitté Paris pour une fermette écolo située dans le Poitou, où elle a fondé le magazine Habitat Naturel.  Elle a réussi le pari de concilier confort de vie, innovations, économies et respect de l’environnement. Elle témoigne.

J’aime Paris et sa perpétuelle ébullition. Mais on y manque de silence, de verdure, de temps de vivre… J’y habitais depuis sept ans, avec un rythme effréné, lorsque le projet a pris forme. Celui de créer un magazine sur l’éco-habitat et les énergies renouvelables. J’ai donc démissionné de mon confort salarié pour me jeter dans l’aventure et la liberté. Un projet un peu fou à l’époque et tout à créer.

La galère du début

Que je quitte Paris pour m’enterrer dans un coin perdu en a étonné plus d’un. Pourtant, cette fermette achetée trois ans auparavant pour accueillir un cheval et y respirer le week-end présente beaucoup d’avantages. La vie y est moins chère, c’est une région dynamique sur le plan de l’environnement, et c’est l’occasion d’expérimenter des matériaux, des techniques et des équipements. Un véritable laboratoire pour ce magazine !
Après une traversée du désert de neuf mois dans un confort très relatif, Habitat Naturel sort enfin, entraînant avec lui une drôle de vie, en mouvement perpétuel. Des salons, des reportages, des réunions… Il faut trouver des solutions pour la jument, le chat et les poules en mon absence. Le renard s’occupera radicalement de ces dernières !

Prouver qu'on peut vivre autrement

Dans ce coin paumé aux orages violents, pas d’adsl et il a fallu changer trois fois d’opérateur pour capter avec un téléphone portable. La poste est à 7 km, tout comme le plus proche commerce. Le magazine existe quand même. Mieux, il augmente sa diffusion. Aujourd’hui, après six années de "travaux", la fermette bicentenaire commence à offrir un confort digne de notre siècle : capteurs photovoltaïques puis thermiques, chaudière automatique à granulés. Un confort qui sera d’autant plus apprécié que le seul chauffage de la maison était jusqu’ici un insert à bois, qui avait la mauvaise habitude de laisser refroidir la maison en mon absence. La maison est aujourd’hui isolée avec des isolants naturels, laine de mouton, fibre de bois, paille, terre, chanvre… chaque fois, une façon de montrer que c’est possible.

Des hauts et des bas

Il y a eu les moments forts, en général les jours de bouclage du magazine. La jument qui décide de trouver l‘herbe plus verte à 3 km, l’orage qui fait sauter courant et téléphone. Mais aussi les bons moments. Les réunions de travail qui prennent des airs de déjeuners sur l’herbe, les copains qui viennent coller les étiquettes des premiers abonnés ou tout simplement les bonheurs simples de la nature : les agneaux qui naissent dans la grange, les premières cerises, la période des foins ou celle des vendanges, la générosité de mon potager qui se débrouille tout seul !

Job et modes de vie en cohérence

La vie à la campagne, c’est un esprit d’entraide permanente. Un coin de la grange pour le voisin en échange de ses bons soins pour la jument. On y est isolé, mais jamais seul. Bref, une vie qui, en quelque sorte, me permet de joindre le geste à la parole, en essayant moi-même de réduire au mieux mon empreinte écologique. Relevés réguliers de kilowatt/heure, pesées mensuelles des cendres de la chaudière, nouveaux projets d’investissements… Tout ça a un jet de deux heures de TGV de la furie de la capitale… Il aurait fallu être fou pour s’en passer !

Corinne Lepage, députée européenne et avocate lance Terre Démocrate , un club sous forme de réseau social qui affiche le "désir de faire émerger des solutions nouvelles". L’ambition : s’appuyer sur l’expérience de ceux qui ont décidé de vivre autrement. "Vivre autrement", un slogan qu’elle connaît bien puisqu’elle est l’auteure d’un ouvrage éponyme. Avant son départ à Copenhague, interview pour Toutpourchanger.com.

TPC : Que signifie concrètement pour vous le concept "vivre autrement" ?
Oser se poser les bonnes questions en matière de vie courante : transport, consommation, production, construction, et plus largement d’organisation de la société, de la gouvernance, de la justice… C’est le meilleur moyen de trouver les réponses appropriées afin de réussir à changer la mécanique de notre société.

TPC : Pourquoi ne semble-t-il pas possible de décliner cette façon d’appréhender les problèmes par le biais des partis politiques ?
Je me suis posé la question et j’ai fait le constat qu’au sein des partis on n’y arriverait pas. Parce que ce sont des instruments de conquête du pouvoir. On ne peut donc pas traiter ces questions concrètement, les partis ne sont pas prévus pour ça. C’est pourquoi je lance Terre Démocrate, un réseau social à but politique. L’idée est de montrer comment des gens qui changent des aspects de leur vie quotidienne peuvent mettre leur expérience en commun. C'est le nouveau projet auquel je vais m'atteler dans les mois à venir.

TPC : Comment faire en sorte de changer la vie des citoyens pour que la société change dans son ensemble ?
Il faut permettre à ceux qui ont changé d’expliquer ce qu’ils ont mis en place pour qu’ensuite les uns et les autres appliquent ces nouveaux modèles si cela les intéresse. Il faut imaginer de nouvelles pratiques et mettre en cohérence toutes ces actions dans des domaines très différents afin que l’ensemble fonctionne. C'est un mouvement citoyen pour favoriser le changement. Il faut que ça fourmille d’idées et surtout de réalisations. Ce qui m’intéresse c'est l'action, parce que des gens qui se contentent de penser entre eux à longueur de temps, ça suffit !

TPC : Et de votre côté, que faites-vous pour appliquer ce principe du "vivre autrement" ?
Il y a des choses que je préserve, du temps avec mon mari ou avec mes enfants et mes petits-enfants, pour la lecture… Tout mon temps libre est en famille, c'est ce qui m’équilibre. Après, le reste se met en place : les contraintes vis-à-vis des gens qui me font confiance, les clients de l’étude par exemple, les dossiers que je défends, mes activités politiques. Je prends mon métier de députée européenne très à cœur. Je travaille énormément. Je ne compte pas mon temps. Puis je n’ai pas tout fait simultanément. J’ai été ministre quand mes enfants étaient déjà grands. Je n’ai aucune vie mondaine, et je ne pratique pas le lèche-vitrines par exemple. J’ai un certain nombre d’objectifs dans ma vie et je construis les moyens d’y parvenir. J’essaye de concilier les différentes sphères personnelles et professionnelles.


Vivre autrement
Dans son ouvrage sorti au printemps 2009, Corinne Lepage propose de changer le monde. Pour elle, la crise est une chance unique de refonder notre système dans sa globalité permettant ainsi de garantir le respect des générations futures dans tout choix politique, énergique, écologique... Ni croissance ni décroissance mais "évolution soutenable", "mutualisation énergétique", "bio-mimétismes".
Vivre autrement, Corinne Lepage, Grasset, 9 €.

 

Aboneobio.com, premier site d'abonnement aux produits quotidiens, cosmétiques et d'entretien écolo et équitables pour changer nos habitudes de consommation en douceur. Pendant un an, vous recevez de quoi couvrir les besoins de votre famille. Fondatrice du site, Laurence Moulin, femme écolo du mois d’octobre dans le magazine Top Santé, nous explique son engagement et son expérience de la création d'entreprise.

TPC : Pourquoi un tel intérêt pour la question bio ?
Consommer bio devient une évidence quand on cherche du sens à sa consommation. Consommer bio c’est plus de respect pour sa santé, pour l’environnement et pour les hommes. C’est consommer propre et naturel. Si je vous demande de parler de vos achats de gel douche, savon, shampoing, lessive, liquides vaisselle ou ménagers, vous n’y avez pas réfléchi, car on prend l’habitude de les déposer dans le caddy sans vraiment prendre la mesure de l’impact sur l’environnement, la santé ou notre budget. Or ces gestes ne sont pas anodins. On accumule 2 kg de produits chimiques sur sa peau en une année. Sur 100 000 molécules chimiques sur le marché, seules 5 000 ont été testées et 100 sont classées cancérigènes. Chaque jour de nouvelles molécules sortent sans qu’on en connaisse l’impact. Sans compter l’effet cocktail dû à l’association des molécules entre elles, dénoncés par les cancérologues. Il nous faut changer nos comportements d’achats, et vite ! Il faut acheter moins et mieux.


TPC : Comment en êtes vous arrivée à vous engager dans cette voix du bio et de la création d'activité ?
J’étais chargée d’un évènementiel lié au commerce et c’est dans ce cadre que j’ai organisé le premier village du commerce équitable en 2003. J’avais fait le tour du poste et je voulais créer une entreprise. J’ai pris conscience des dangers de la cosmétique quelques mois plus tard grâce à un reportage de l'émission Envoyé Spécial sur les substances chimiques des cosmétiques. Je pensais acheter ce qu’il y avait de mieux pour ma famille et j’ai été sidérée des explications sur le contenu des produits. L’idée m’est venue d’aider les consommateurs à passer aux produits bios du quotidien en déclinant le concept d’abonnement de paniers fruits et légumes déjà en vogue.

TPC : Quels freins rencontrez-vous dans le cadre de votre projet ?
Être précurseur veut dire aussi aller chercher des niches de clientèles. Tout le monde n’est pas prêt aujourd’hui à remettre en cause ses pratiques d’achats. 2 % du public intéressé par l’innovation et par la notion de consommation responsable se trouvent dans toutes les catégories. Il n’y a pas un profil type. Cela va des futurs parents qui prennent conscience au moment de la grossesse et de l’arrivée du bébé, à ceux qui ont perdu un proche à cause du cancer. Certains retraités veulent changer d’habitude pour préserver les générations à venir. Des adolescents sont déjà conscients de la galère qui les attend. Il ne faut pas non plus s’imaginer qu’ouvrir un site Internet signifie faire du chiffre rapidement et simplement. Encore moins si on affiche des valeurs liées au développement durable !

TPC : Quels conseils donner à ceux qui voudraient se lancer dans une telle aventure ?
Il faut s’organiser pour tenir ! Financièrement mais aussi s’assurer de l’appui de son entourage. L’investissement est important, il doit être partagé. S’entourer de compétences, prendre le temps de la réflexion et du positionnement en amont, ne rien lâcher sur les valeurs, ce sont elles qui donnent du sens à l’aventure. C’est une course de fond, il faut s’accorder des pauses et gérer l’énergie et le temps. C’est le plus dur !

TPC : Qu'est-ce que vous retirez de votre expérience de la création d’activité ?
C’est une source d’enrichissement personnel incroyable. Je suis Entrepreneur d’Avenir et je me retrouve dans les valeurs partagées. Chaque matin je me lève avec la même joie de travailler et de faire avancer aboneobio. En tant que femme créatrice, j’applaudis quand je vois une femme, mère, aller au bout de son projet. C’est vrai que l’on doit jongler entre des tâches et des responsabilités multiples et c’est parfois lourd à gérer. J’ai la chance que mes filles et mon mari soutiennent l’aventure.

Le conseil clé de Laurence

Il faut oser, ne pas se laisser démonter par ceux qui n’y croient pas. Si cela a du sens pour vous, si c’est le bon moment en termes d’organisation, de vie pro et perso, il faut creuser, confronter le projet aux autres, chercher à en améliorer la cohérence, travailler le discours, s’entourer de partenaires fiables et s’accorder le temps nécessaire pour s‘assurer le succès.
On a tous en nous les ressources, on a Tout pour changer ! Il faut s’autoriser à mobiliser ces énergies et se faire confiance.

Changer d’habitudes, être plus attentif au monde, aux autres et à soi, consommer intelligent, plus sain et plus économe, se construire un habitat écolo-compatible, bref, toutes ces habitudes qui contribuent à assurer un avenir à la planète vous paraissent difficile à appréhender, à maitriser.
Pour vous aider à habiter autrement, un métier vient de naitre : "l’éco-coach".
Un article du site Ecolife.fr
fait référence à l’enseigne Kbane située près de Lille. "Le marché est trop technique et pas assez accessible", estime un des co-fondateurs. Kbane se propose de nous accompagner dans nos grands projets : installation de pompes à chaleurs, de panneaux photovoltaïques, d'isolation thermique... et "d'identifier des solutions économiques et de moins consommer avant de rajouter du matériel". L’entreprise organise également des ateliers de formation et souhaite se développer à terme dans d'autres villes françaises.

Une maison en bois

À propos d’éco-construction, le salon maison bois 2009 qui se tient prochainement vient d’organiser son palmarès qui récompense architectes, concepteurs et maîtres d’ouvrage pour leurs réalisations exceptionnelles récentes. Voici le premier prix dans la catégorie Grands espaces, une maison d'habitation située à St Cyr l'Ecole dans les Yvelines, réalisée par l’atelier d'architecture JAM, basé dans le 11e arrondissement de la capitale. Pas mal, non ?

RDV du 16 au 19 octobre au Parc des expos d’Angers
www.salon-maison-bois.com

©Palmarès Salon Maison Bois Angers 2009 / Photographe : Atelier Jam



19/10/2010
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